[LA PROVENCE] "Ils ne se rendent pas compte des conséquences pour la suite"
Vous étiez à Matignon hier matin, Comment qualifieriez-vous cette rencontre avec Élisabeth Borne?
Une réunion courtoise. Elle a fait une intro en expliquant que c'était important de dialoguer. Qu'il y avait beaucoup de sujets qui intéressaient les travailleurs notamment dans la continuité du projet de retraites.
Toutes les organisations syndicales ont pris la parole avec une seule question: madame la Première ministre, êtes-vous prêtes à retirer le projet de réforme avec des nuances suivant les organisations? Elle a commencé à répondre qu'il fallait laisser le conseil
constitutionnel se prononcer. En résumé, attendons le 14 avril. Laurent Berger a repris la parole en disant que nous étions huit à avoir posé la même question : pourquoi n'avez-vous pas ré pondu? Elle lui a répondu qu'il n'y aurait pas de retrait de la réforme. Laurent Berger lui a rétorqué qu'il était inutile de continuer. La réunion s'est terminée au bout d'une heure ...
Vous estimez que c'est une réunion ratée?
Il fallait sortir de cette impasse et arrêter de se parler par médias interposés. Malheureusement, elle s'entête à dire que les 64 ans vont passer coûte que coûte alors que personne ne le veut. Cela ne fonctionne pas. Ils veulent discuter des sujets pour l'après qui sont directement en lien avec les retraites.
Laurent Berger a expliqué que la crise sociale devenait une crise démocratique.
C'est fort de la part d'un syndicat ... On l'évoque depuis l'utilisation du 49.3. Car tout légal qu'il soit, il a crispé sur cet aspect démocratique. Les slogans ont changé depuis et beaucoup plus de jeunes sont venus manifester car la question démocratique est devenue centrale. Et cela fait plutôt le jeu du Rassemblement national.
Laurent Berger a également évoqué le rôle du conseil constitutionnel qui doit rendre sa décision le 14 avril. N'est-ce pas une forme de pression?
On en appelle à la sagesse du Conseil constitutionnel qui va se positionner en droit, et sur lequel il n'y a pas de pression à faire. Mais souligner le caractère hautement politique de cette crise est important. On en appelle solennellement au Conseil constitutionnel, qui a tout à fait conscience du poids de sa responsabilité, avec un contexte politique et démocratique un peu particulier. Il donnera une double réponse sur le projet de loi et la recevabilité du projet de référendum d'initiative partagée.
Aujourd'hui a lieu la 11 journée de mobilisation. L'intersyndicale se réunit ce soir. Pensez-vous qu'il faut continuer à organiser d'autres journées?
On va en discuter. Mais je pense que cela va être compliqué de ne pas faire de mobilisation la semaine prochaine avant la décision du Conseil constitutionnel du 14 avril. On a aussi la responsabilité d'offrir un cadre à ces travailleurs qui veulent manifester et de
canaliser la colère sociale. Je reste confiante pour la mobilisation d'aujourd'hui. On a déjà fait depuis plusieurs mois la démonstration du nombre.
À part le retrait de la loi, comment sortir de ce qui ressemble à une impasse ?
On a essayé autre chose et on nous a claqué la porte au nez. Je crains que pour le gouvernement, ce soit: ça passe ou ça casse. Mais en fait, nous, on dit que si la réforme passe, cela casse. Ils ne se rendent pas compte des conséquences pour la suite.
Propos recueillis par Florent PROVANSAL