[LE PARISIEN] Télétravail : chez SFR, des salariés privés de tickets-restaurants depuis le premier confinement
Depuis mars 2020, quelque 2000 employés de l’opérateur de télécommunication SFR travaillant à distance se sont vus retirer leurs chèques-déjeuners. La CFDT a assigné le groupe en justice. L’entreprise ne serait pas la seule dans ce cas.
Des salariés de SFR « en télétravail imposé » doivent « en plus prendre en charge intégralement leur déjeuner », déplore Sylvie Gache (CFE-CGC). LP/Aurélie Ladet
Par Bérangère Lepetit avec Charlotte Robinet
Pour près de 2000 salariés de SFR, la crise du Covid-19 aura eu une conséquence inattendue. Depuis près d'un an, ces employés de l'opérateur de télécommunications qui, autrefois, bénéficiaient de tickets-restaurants pour leur pause déjeuner se sont vus retirer cet avantage, dénoncent les syndicats. Un manque à gagner qui concerne des personnels travaillant dans les agences en régions, sur des sites sans espace de restauration collective et qui persiste depuis le début du premier confinement en mars 2020 avec la mise en place du télétravail.
La situation a provoqué en interne l'indignation des syndicats. « C'est très injuste et à la limite de la légalité ! SFR cherche à faire des économies sur le dos des salariés ! » tonne Xavier Courtillat, délégué syndical central CFDT, premier syndicat représentatif. « Les salariés se retrouvent en télétravail imposé et ils doivent en plus prendre en charge intégralement leur déjeuner », déplore Sylvie Gache, représentante du personnel à Toulouse (Haute-Garonne) pour la CFE-CGC. « Pour les bas salaires, les tickets-restaurants représentent un petit complément de revenu non négligeable de l'ordre de 100 euros par mois. Ce complément a disparu », renchérit Abdelkader Choukrane, délégué syndical central de l'Unsa.
La CFDT veut une indemnité d'occupation du domicile
En juin 2020, la tension est montée d'un cran quand la CFDT a assigné en justice la direction de l'entreprise au tribunal de grande instance de Paris (TGI) pour faire « respecter les droits des salariés ». Le syndicat demande, en plus du retour du versement des titres-restaurants de 9 euros, une indemnité d'occupation du domicile à des fins professionnelles. Aucune date n'a encore été fixée pour l'audience qui devrait se tenir en 2021. Contactée, la direction n'a pas souhaité faire de commentaires.
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Mais en interne, l'un des dirigeants, sollicité par les salariés, aurait justifié l'arrêt du versement des tickets-restaurants par le fait que les salariés en télétravail auraient désormais « du temps libre » pour se préparer à manger. Un argument balayé par les syndicats. « Pour justifier cette mesure, la direction se base sur l'accord sur le télétravail signé dans l'entreprise en 2018. A l'époque, la direction avait imposé que les salariés qui choisissaient de faire une journée de télétravail par semaine n'aient pas droit, ce jour-là, à leur chèque-déjeuner. Mais il s'agissait d'un jour par semaine et c'était sur la base du volontariat, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui », argumente Xavier Courtillat.
Le patronat conscient du risque de « tensions »
Le cas de SFR ne serait pas unique. Alors que les entreprises sont aujourd'hui invitées à prendre en charge financièrement une partie des frais engagés par les salariés en télétravail, qui peuvent dépasser les 100 euros par mois, des employeurs auraient, a contrario, supprimé le versement des tickets-restaurants depuis plusieurs mois. « Certaines entreprises, une minorité heureusement, font actuellement des économies en supprimant les chèques-déjeuners de leurs salariés en télétravail, confirme le président de la CFE-CGC François Hommeril. C'est scandaleux et totalement injustifié. Le Code du travail décrit de façon très précise qu'il est important de faire une pause déjeuner. Quand on travaille chez soi, le domicile devient le lieu de travail. Les salariés sont en droit de demander le retour de ces tickets-restaurants. »
Du côté du patronat, on reconnaît aussi que la question de la prise en charge du déjeuner est « le sujet qui risque de générer le plus de tensions dans le contexte actuel », pointe Eric Chevée, en charge du social à la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises). Il souligne que « cela peut devenir un point de crispation entre les employeurs et les salariés ».