[EDITIONS TISSOT] Confier au salarié des tâches contraires aux préconisations du médecin du travail : gare au harcèlement moral
Le fait de confier à un salarié des tâches qui sont contraires aux préconisations du médecin du travail peut-il être constitutif de harcèlement moral ? La Cour de cassation a répondu.
Harcèlement moral : rappels
Le Code du travail défini le harcèlement moral comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet de dégrader les conditions de travail du salarié et qui sont susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Ainsi, pour que du harcèlement moral soit caractérisé, il faut des actes répétitifs qui ont des conséquences sur le travail du salarié et qui peuvent affecter sa santé. Un fait isolé ne pourra pas être constitutif de harcèlement moral.
Le Code ne précise toutefois pas quels types d’agissements pourraient constituer du harcèlement : cette notion est laissée à l’appréciation des juges.
Harcèlement moral : le non-respect des consignes du médecin du travail peut le caractériser
L’employeur est tenu à une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés. La Cour de cassation a, à plusieurs reprises, affirmé qu’un employeur qui ne respecte pas les préconisations du médecin du travail manque nécessairement à cette obligation de sécurité.
Elle va même plus loin, comme le montre un arrêt rendu récemment. Dans cette affaire, un salarié avait été déclaré par le médecin du travail apte avec restrictions liées notamment au port de charges. Un an plus tard, le salarié a été mis à pied puis licencié pour faute grave. Le salarié a demandé la nullité de ce licenciement pour discrimination en raison de son état de santé et harcèlement moral.
La cour d’appel a condamné la société : les juges ont relevé que l’employeur ignorait les préconisations du médecin du travail et confiait régulièrement au salarié des tâches qui dépassaient ses capacités physiques. Elle considère que cela met en péril l’état de santé du salarié et caractérise un harcèlement moral.
Pour sa défense, l’entreprise met en avant le fait que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un harcèlement moral et que la décision de licencier est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. La Cour de cassation rejette cependant cet argumentaire et valide la décision rendue par la cour d’appel.
La Haute juridiction réaffirme donc une position adoptée dans un précédent arrêt : le fait de ne pas suivre les préconisations du médecin du travail et de confier régulièrement au salarié des tâches dépassant ses capacités physiques peut être constitutif de harcèlement moral.
Vous souhaitez en savoir plus sur le harcèlement moral et sexuel ? Les Editions Tissot vous conseillent leur « Dossier - Le harcèlement sexuel et le harcèlement moral ». Vous pouvez également télécharger la fiche « Comment réagir face au harcèlement ? ».
auteur : Camille Kriegel