Sur le climat de la société française, Laurent Berger dit sentir "quelque chose d’inquiétant, une société fracturée, minée par beaucoup de précarité. Je sens une tension en train de monter, la précarité entraine une précarité démocratique et je suis plutôt pour essayer de s’en sortir ensemble, en cherchant du commun".
Sur la gestion de la pandémie, il regrette un manque d'implication des élus locaux : "les élus locaux ne sont pas assez impliqués dans la lutte contre la pandémie, ça vaut aussi pour les associatifs".
Laurent Berger, explique que la "crainte sur la perte des emplois est très très forte" et que les variations sur le télétravail "créé une forte lassitude" chez les salariés, et "ces incertitudes se sont transformées en fatigue".
Faudra-t-il rendre le vaccin obligatoire en entreprise ? "En entreprise certainement pas" répond Laurent Berger "mais il faut une forte incitation des citoyens. Je ne suis pas sûr qu’il faille aller vers un vaccin obligatoire."
Un Noël avec "le moins d'Amazon possible"
En évoquant le Black Friday, et la demande des commerçants de pouvoir être ouverts ce jour-là, pour ne pas laisser toute la place à Amazon, Laurent Berger rappelle que "ce n’est pas nouveau, je trouve cette histoire de black friday inquiétante sur ce que ça veut dire de notre relation à la consommation. Le problème c'est qu'on ne peut pas en appeler seulement à la responsabilité des citoyens. _Il faut essayer de faire en sorte qu’on ait un Noël avec le moins d'Amazon possible_. Il faudrait de la régulation au niveau européen et national. Il y a des citoyens qui n’ont pas d’autres solutions que de faire appel à ces plateformes. Je préférerais que ce soit une fiscalisation de leurs bénéfices sur le long terme".
Laurent Berger rappelle que des milliers de salariés travaillent pour Amazon, "pas question de leur jeter l’opprobe."
Le patron de la CFDT dénonce par ailleurs le chômage partiel appliqué au secteur de la grande distribution pour 100 000 salariés. "C’est légal mais ils l'ont fait sans informer les représentants des salariés. Je dis attention, il y avait peut-être moyen de faire autrement, car même avec moins de fréquentation, la charge de travail est la même."
Interrogé sur la fermeture du site de Bridgestone, il répond que "Bridgestone : c’était écrit. Il faut les coller au mur, pour qu’ils financent le plan social, le reclassement et la réindustrialisation du site. Pour l'avenir, il faut de la conditionnalité des aides publiques pour les autres entreprises plus tard".
Laurent Berger plaide pour un retour de l'impôt sur les grandes fortunes, l'ISF, car "c'est une des solutions pour sortir de cette impasse". Il faut taxer le capital "au même niveau que le travail", taxer "la transmission du patrimoine, car 50% du patrimoine est détenu par 10% des plus riches". Mais il pense que l'ISF ne suffisait pas en tant que tel, car il estime "qu'il faut une contribution des hauts plus revenus à la solidarité."