[LA CROIX] ARTICLE DU 8 OCTOBRE : Marylise LEON - « En refusant de partager le pouvoir, Emmanuel Macron a abîmé la démocratie »
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La Croix L’Hebdo : Dans quel état d’esprit êtes-vous, en cette période bousculée, sur le plan politique et social ?
Marylise Léon : Je suis inquiète à plusieurs égards. Dans les entreprises, nos délégués et militants nous remontent des tensions et des craintes. L’instabilité politique en France génère de l’incertitude.
Les directions tardent à valider des investissements. À cela s’ajoutent les effets des droits de douane imposés par le président américain, Donald Trump. Quant à la Chine, elle se montre offensive,
en réorientant sa surproduction vers l’Europe, ce qui fragilise notre tissu économique. La filière cognac, par exemple, se retrouve au coeur de cette guerre commerciale, avec toute une filière mise à mal, producteurs, fabricants de flacons, etc. Dans l’industrie, la sidérurgie et la chimie souffrent. Or l’Union européenne a du mal à riposter. Sur le terrain, les salariés nous disent « C’est quoi notre avenir ? ». Les désordres internationaux, eux aussi, me préoccupent.
Lesquels ?
Nous assistons à un bouleversement de la démocratie. Évidemment, je pense à la présidence Trump aux États-Unis. Mais aussi à ces pays européens où l’extrême droite progresse, en France, en Allemagne, en Italie et au Royaume-Uni. Ce bouleversement s’accompagne d’une remise en cause des institutions, notamment de la justice, qui encore récemment en France, a fait l’objet d’attaques dans la foulée de la condamnation de Nicolas Sarkozy (l’ancien président a été condamné le 25 septembre à cinq ans de prison
ferme avec exécution provisoire pour association de malfaiteurs dans le cadre de l’affaire sur le financement de sa campagne de 2007, NDLR). Je suis frappée de voir que même des ministres n’hésitent plus à dénoncer une décision de justice. Une telle attitude est délétère.
Pourquoi elle
« J’en ai assez d’avoir (…) le sentiment d’être la seule adulte dans la pièce. » En mars 2025, sur BFM TV, Marylise Léon lâchait ses coups, en plein conclave sur les retraites. N’épargnant personne : ni François Bayrou, alors premier ministre, ni le patronat, ni les autres syndicats, qui avaient claqué la porte ou s’apprêtaient à le faire. Une syndicaliste sous pression, mais avec une franchise et une envie de dépasser le petit théâtre politique qui nous avaient frappés. Et donné envie de la rencontrer, au coeur de la crise
sociale, budgétaire et politique que traverse le pays.
Quelques mois plus tard, la patronne de la CFDT, premier syndicat de France, nous a reçus dans ses locaux parisiens. Un peu en retard et sans une minute à perdre, bref, là encore sous pression – on le comprend. Mais sans jamais le laisser paraître, comme tout bon négociateur.
(Tout l'entretien dans documents)