[PRESSE CITRON] Orange : sur le départ, Stéphane Richard règle ses comptes avec l’Etat et l’Europe
Evincé d’Orange suite à sa condamnation dans l’affaire Tapie, Stéphane Richard dit ses quatre vérités sur ce qu’il pense de l’action de l’Etat et de l’Europe sur le secteur des télécom.
Faute de pouvoir rester à la tête d’Orange, Stéphane Richard règle ses comptes avec l’establishment – à savoir l’Etat-actionnaire qui l’a porté à la tête de l’opérateur, et l’Union Européenne. Selon le PDG par intérim de l’opérateur, « l’Etat actionnaire d’Orange n’a jamais exprimé beaucoup d’envie, beaucoup d’enthousiasme – c’est le moins que l’on puisse dire – sur des grandes combinaisons européennes ».
Ce dernier reproche à l’Etat français d’empêcher de grandes fusions entre opérateurs européens, histoire de peser face à la montée en puissance des GAFAM sur le vieux continent. Stéphane Richard avait effectivement tenté de favoriser un rapprochement entre Orange et Deutsche Telekom avant de jeter l’éponge. Selon lui, les autorités françaises mettent en avant « le risque d’une forme de dilution d’Orange dans un ensemble européen ».
Stéphane Richard pense que l’Etat et l’Europe ont favorisé à leur insu la domination des GAFAM
Avec à la clé une « perte d’identité, de contrôle, et éventuellement une fuite des centres de décision de l’entreprise en dehors de France ». L’Europe est pourtant favorable à ce type de regroupements, mais à l’entendre c’est surtout la France qui traîne des pieds de peur de perdre la main sur ses fleurons. Mais le patron démissionnaire d’Orange a également, pourtant, des mots assez durs envers l’Europe.
Selon lui, “il y a malheureusement une extraordinaire inertie dans le système” – les instances européennes auraient trop fait le jeu de la concurrence qui a fait baisser les prix au profit des consommateurs, mais qui a dans le même temps selon Stéphane Richard, affaibli les opérateurs. « Si vous prenez un pays comme l’Espagne, où Orange est présent, il y a plus de 15 opérateurs ! », déplore-t-il.
Il ajoute que « toute l’aventure boursière des télécoms est une catastrophe, c’est un désastre », ajoutant que la capitalisation des opérateurs atteint des “valorisations ridicules”. Le cours boursier des grands opérateurs européens a en effet plutôt baissé dans l’ensemble, ces dernières années. Une conséquences de leur affaiblissement, selon Stéphane Richard. Qui enchaîne avec un autre sujet difficile : les GAFAM.
Selon lui, la Commission Européenne a mis trop de temps à réagir, et a un temps avantagé sans le vouloir les GAFA par rapport aux opérateurs. Au point que les GAFAM ont établi selon lui en Europe une véritable “colonie numérique” et sont de véritables passagers clandestins des infrastructures financées par les opérateurs européens. S’il reconnaît que Bruxelles a pris entre-temps la mesure du problème, il espère désormais des gestes forts pour renforcer les opérateurs européens et rétablir l’équilibre face aux géants américains.