[SYNDICALISME HEBDO] France Télécom - Orange : victoire juridique d’un côté, regain de tensions de l’autre
Le 30 septembre, la cour d’appel de Paris a confirmé le harcèlement moral institutionnel et la culpabilité des ex-dirigeants de France Télécom. L’entreprise, elle, connaît à nouveau des tensions.
Certes, les peines prononcées en première instance à l’encontre de Didier Lombard et Louis-Pierre Wenès ont été quelque peu allégées : la cour a commué les peines de prison ferme en sursis. « Il n’en reste pas moins qu’une entreprise du CAC 40 et ses dirigeants sont finalement reconnus coupables pour des agissements de harcèlement institutionnel, ce qui est une première dans une affaire de cette ampleur », note Élisa Mistral, la déléguée syndicale centrale (DSC) d’Orange, après le rendu du jugement de la cour d’appel, le 30 septembre dernier. « Cela confirme que le harcèlement institutionnel est pénalement répréhensible », ajoute Me Jonathan Cadot, l’avocat de la CFDT (qui s’est portée partie civile) et que « le harcèlement moral ne se limite pas à des situations de harcèlement interpersonnel ».
En cela, le procès France Télécom fera date. « D’abord parce qu’il est le résultat d’une mobilisation sociale exemplaire, que ce soit sur le terrain judiciaire ou sur le terrain de la réparation, avec la reconnaissance d’un préjudice moral pour les victimes, rappelle Élisa Mistral. Environ 1 800 dossiers ont été traités par une commission ad hoc, suivie par les organisations syndicales. » Au-delà du cas France Télécom - Orange, le résultat de ce procès constitue également « un signal envoyé à toutes les entreprises qui se réorganisent de la nécessité de prévenir des risques en matière de harcèlement et de gestion des risques psychosociaux », indique Me Cadot.
De nouveaux plans de transformation et d’économies
Il se trouve qu’Orange fait face à de nouveaux plans de transformation et à un nouveau plan d’économies (visant à économiser un milliard d’euros d’ici à 2023). Tout cela dans un contexte de flou total concernant la future stratégie d’Orange, que la nouvelle direction générale doit dévoiler en février 2023 – ce qui n’est pas sans conséquences sur le climat social dans l’entreprise, au sein de laquelle les organisations syndicales observent un « regain de tensions ». « Nous ne sommes plus dans une situation de harcèlement actif comme à l’époque des plans Next et Act. Mais la situation nous inquiète », indique Élisa, qui note la hausse du taux d’absentéisme de longue durée. La CFDT a d’ailleurs demandé une expertise sur les causes de cet absentéisme.
Fin octobre, un retour d’audit est également prévu sur les accords post-crise. La CFDT attend notamment « que l’on regarde si les garde-fous mis en place après la crise sont effectifs, ou encore quelles mesures mettre en place au regard du contexte actuel », détaille Élisa. Au-delà du verdict prononcé le 30 septembre dernier, l’action de la CFDT d’Orange se poursuit, « pour protéger la vie des personnels dans le cadre des projets de transformation ».
À propos de l'auteur
Emmanuelle Pirat
Journaliste