[accesdroitsocial.fr] Nouveau dispositif : L’activité réduite pour le maintien en emploi

Deux collègues dans une usine

Face à la crise sanitaire, le Gouvernement a rédigé en mai 2020 un projet de loi « relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne ».

Adoptée par le Parlement le 10 juin 2020, la loi a été promulguée le

Cette loi du 17 juin 2020 prévoit notamment la création d’un dispositif spécifique d’activité partielle dénommé « activité réduite pour le maintien en emploi » (ARME)(Article 53 de la loi N° 2020-734 du 17 juin 2020). Ce dispositif est également appelé « activité partielle de longue durée » (ALD). 

Plusieurs points importants devaient encore être précisés (montant de l’indemnisation, durée du dispositif, durée de l’activité réduite….). 

C’est dans ce contexte qu’après 3 semaines de consultations des partenaires sociaux sur plusieurs sujets relatifs à l’emploi dont celui-ci, le 24 juin, le Président de la République a reçu les organisations patronales et syndicales pour leur dévoiler le dispositif de l’ARME, dans sa version définitive.

Le dispositif est entré en vigueur le 1er juillet. Cet outil est souvent présenté comme une alternative aux licenciements économiques. 

En  pratique, il va permettre à l’employeur de diminuer le temps de travail sur une période de 2 ans maximum.

Au cours de ces périodes d’activité partielle, 
le salarié placé en activité partielle recevra une allocation, versée par son employeur. L’employeur recevra quant à lui une aide de l’Etat et de l’Unédic. 

Cet dispositif a ainsi vocation à remplacer le chômage partiel. Par certains côtés, il ressemble également à l’accord de performance collective mais avec un champ plus limité.

Récemment, le groupe aéronautique Safran y a eu recours.

⚠️ Un Décret du 28 juillet 2020 visant à préciser les conditions de recours au dispositif vient d’être publié. 

Ce dispositif est un dispositif temporaire (jusqu’au 30 juin 2022). 


1. Qu’est-ce que l’activité réduite pour le maintien en emploi (ARME) ?

L’activité partielle longue durée permettrait dans une entreprise ou une branche où l’on a vraiment des perspectives d’évolution, d’activité économique, mais à long terme ou à moyen terme […] d’avoir je dirais un partage de problèmes, un partage de la solution […] où au lieu de licencier […] il y ait un accord […] des partenaires sociaux pour diminuer le temps de travail. L’intervention de l’Etat […] viendra compenser une partie de la baisse de salaire que ça représente et l’entreprise devra s’engager sur l’emploi, la formation, en contrepartie […] (Interview de Muriel Pénicaud, sur Europe 1).

Il y a une décrue du chômage partiel qui a commencé […]. L’idée c’est que le système actuel ne vas pas perdurer très longtemps. Mais qu’en revanche, il y a des entreprises qu’il faudra accompagner dans une plus grande durée. C’est des secteurs, je pense typiquement au tourisme, à l’aéronautique, à l’automobile et parfois des entreprises même dans des secteurs qui vont mieux, qui ont des perspectives tout à fait raisonnable d’activités qui reprennent mais plutôt dans 6 mois, dans 12 mois, dans 24 mois, et il faut à tout prix éviter le maximum de licenciements (Interview de Muriel Pénicaud, sur RTL).

En  pratique, ce dispositif permet ainsi de diminuer le temps de travail, sur une durée de 2 ans maximum1.

La réduction de l’horaire de travail ne peut, en principe, être supérieure à 40 % de la durée légale2


2. Les contreparties financières

• Indemnités versées aux salariés 

Le salarié percevra de son employeur 70 % de sa rémunération brute, soit environ 84 % du salaire net (article 8 du décret du 28 juillet 2020).

La rémunération maximale prise en compte pour le calcul de l’indemnité horaire est égale à 4,5 fois le taux horaire du SMIC.

• Allocation perçue par l’employeur

Le taux horaire de l’allocation versée à l’employeur dépend de la date de transmission de l’accord à l’autorité administrative (article 7 du décret du 28 juillet 2020) : 

– Pour les accords transmis avant le 1er octobre 2020 : l’employeur reçoit 60 % de la rémunération horaire brute dans la limite de 4,5 SMIC.
– Pour les accords transmis à l’administration après le 1er octobre 2020 : l’employeur recevra 56 %.

Le taux horaire ne peut être inférieur à 7,23 euros.


3. Mise en place par accord collectif


L’employeur peut bénéficier de ce dispositif sous réserve : 
– de la conclusion d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe (a),
– ou de la conclusion d’un accord collectif de branche étendu (b).

⚠️ Dans tous les cas, des engagements en matière de maintien dans l’emploi devront être pris par l’employeur. 

a/ En cas de signature d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe : 

L’accord collectif devra comporter un préambule présentant un diagnostic sur la situation économique et les perspectives d’activité de l’établissement, de l’entreprise, du groupe ou de la branche.

Par ailleurs, l’accord doit définir (article 1 du décret du 28 juillet 2020) :
1° La date de début et la durée d’application du dispositif spécifique d’activité partielle ;
2° Les activités et salariés auxquels s’applique ce dispositif ;
3° La réduction maximale de l’horaire de travail en deçà de la durée légale ;
Les engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle ;
5° Les modalités d’information des organisations syndicales de salariés signataires et des institutions représentatives du personnel sur la mise en œuvre de l’accord. Cette information a lieu au moins tous les 3 mois.

Enfin, l’accord pourra notamment prévoir :
1° Les conditions dans lesquelles les dirigeants salariés exerçant dans le périmètre de l’accord, les mandataires sociaux et les actionnaires, dans le respect des compétences des organes d’administration et de surveillance, fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés pendant la durée de recours au dispositif ;
2° Les conditions dans lesquelles les salariés prennent leurs congés payés et utilisent leur compte personnel de formation, avant ou pendant la mise en œuvre du dispositif ;
3° Les moyens de suivi de l’accord par les organisations syndicales.

b/ En cas de d’accord de branche : 

Si l’entreprise souhaite bénéficier du régime en application d’un accord de branche, elle devra élaborer, après consultation du CSE, lorsqu’il existe, un document conforme aux stipulations de l’accord de branche et définissant les engagements spécifiques en matière d’emploi.

Le document précisera les conditions de mise en œuvre, au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, des stipulations de l’accord de branche étendu.

Il devra notamment comporter les engagements souscrits par l’employeur en matière d’emploi.


4. Validation ou homologation par l’autorité administrative


L’accord collectif ou le document élaboré par l’employeur, doit être transmis à l’autorité administrative pour validation ou homologation. La demande est effectuée par voie dématérialisée. 


• Transmission de l’accord ou du document à l’autorité administrative

L’accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe est transmis à l’autorité administrative pour « validation ».

Si l’entreprise souhaite bénéficier du régime en application d’un accord de branche, c’est le document qui sera transmis pour « homologation ». La demande d’homologation sera accompagnée de l’avis rendu par le CSE, si ce comité existe.


• Contrôle de l’autorité administrative

Concernant les accords collectifs, l’autorité administrative valide l’accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe mentionné dès lors qu’elle s’est assurée :
1° Des conditions de validité et de la régularité de la procédure de négociation ;
2° De la présence dans l’accord de l’ensemble des dispositions obligatoires.

La procédure de validation est renouvelée en cas de conclusion d’un avenant de révision.

Concernant le document, l’autorité administrative homologue le document élaboré par l’employeur en application d’un accord de branche, après avoir vérifié :
1° La régularité de la procédure d’information et de consultation du CSE, lorsqu’il existe ;
2° La présence de l’ensemble des dispositions obligatoires ;
3° La conformité aux stipulations de l’accord de branche ;
4° La présence d’engagements spécifiques en matière d’emploi.

La procédure d’homologation est renouvelée en cas de reconduction ou d’adaptation du document.


• Décision de validation ou d’homologation

L’autorité administrative notifie à l’employeur la décision de validation dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord collectif.

Ce délai est porté à 21 jours en cas d’homologation du document élaboré par l’employeur.

Elle la notifie, dans les mêmes délais, au CSE lorsqu’il existe et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales représentatives signataires lorsqu’elles existent.

Le silence gardé par l’autorité administrative vaut décision d’acceptation de validation ou d’homologation. Dans ce cas, l’employeur transmet une copie de la demande de validation ou d’homologation, accompagnée de son accusé de réception par l’administration, au CSE lorsqu’il existe et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales représentatives signataires lorsqu’elles existent.

La décision de validation ou d’homologation ou, à défaut, les documents précités et les voies et délais de recours sont portés à la connaissance des salariés par voie d’affichage sur leurs lieux de travail ou par tout autre moyen permettant de conférer date certaine à cette information.

La décision d’homologation ou de validation vaut autorisation d’activité partielle spécifique pour une durée de 6 mois. L’autorisation est renouvelée par période de 6 mois. 


5. Le bilan

L’employeur devra adresser à l’autorité administrative, avant l’échéance de chaque période d’autorisation d’activité partielle spécifique, un bilan portant sur le respect de ses engagements.

Ce bilan sera accompagné d’un diagnostic actualisé de la situation économique et des perspectives d’activité, ainsi que du procès-verbal de la dernière réunion au cours de laquelle le CSE, s’il existe, a été informé sur la mise en œuvre de l’activité partielle spécifique.

Si l’employeur procède à des licenciements économiques pendant les périodes de recours au dispositif,  l’autorité administrative pourra interrompre le versement de l’allocation et demander à l’employeur de rembourser les sommes perçues3.

A noter : toutes ces dispositions sont applicables aux accords collectifs et aux documents transmis à l’autorité administrative pour validation ou homologation, au plus tard le 30 juin 2022.